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Le Canada devrait immédiatement habiliter l’OCRE, selon de récents rapports

Mise à jour le 10 mai 2023. Initialement publié le 9 avril 2023.

De récents rapports dans le Globe & Mail ont exposé l’inefficacité du Bureau de l’ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (OCRE), démontrant qu’il devrait immédiatement être doté des pouvoirs nécessaires pour exiger la production de documents et obliger les entreprises accusées de violations présumées des droits humains et de l’environnement à témoigner sous serment.

Le gouvernement fédéral s’était initialement engagé à doter l’OCRE de ces pouvoirs d’investigation, mais il n’a pas tenu sa promesse lors de sa création.

Selon un rapport publié hier par Tavia Grant du Globe & Mail (traductions par le RCRCE) :

  • Deux des groupes dont les plaintes ont déclenché les premières affaires actives du bureau ont déclaré que l’OCRE est « lent, inefficace et a créé un processus enlisé dans la bureaucratie ».
  • Selon Mehmet Tohti, directeur exécutif du Uyghur Rights Advocacy Project, basé à Ottawa, la procédure de plainte « a été entravée par des règles de confidentialité ‘inutiles’, ainsi que par l’incapacité, jusqu’à présent, de mener une enquête sur les questions soulevées ».
  • Selon Hugh Doherty, coprésident du groupe Canadians in Support of Refugees in Dire Need, le temps que l’OCRE a pris jusqu’à présent s’apparente à un « non-sens bureaucratique ».

La semaine dernière, une autre enquête, toujours menée par Mme Grant du Globe, a révélé ce qui suit :

  • L’OCRE n’a toujours pas mené à bien une seule enquête en quatre ans, malgré un budget annuel de 4,9 millions de dollars et un effectif de 20 personnes
  • Il existe plus de 50 cas de violations présumées des droits humains liées à des entreprises canadiennes au cours des cinq dernières années, dans 30 pays, sur lesquels les autorités canadiennes pourraient enquêter.
  • 14 organisations de défense des droits humains et représentants syndicaux, dont le RCRCE, ont démissionné le même jour en 2019 du conseil consultatif de l’OCRE, ayant perdu confiance dans l’engagement du gouvernement en faveur de la responsabilité internationale des entreprises.
  • Après que des groupes autochtones d’Amazonie ont déclaré que le manque de pouvoirs de l’OCRE le rendait indigne d’être approché, l’OCRE n’a à plusieurs reprises mis personne à disposition pour des entretiens, et les questions envoyées par courrier électronique n’ont obtenu que des réponses les invitant à visiter leur site Web.

Mme. Grant a publié un autre article le 9 mai 2023, révélant que :

  • Alors que l’OCRE est censé fournir à la Ministre du Commerce international des rapports sur l’état d’avancement des dossiers qu’il examine, la Ministre n’a pas reçu un seul rapport d’évaluation initiale sur un dossier, ni de rapports intermédiaires ou finaux sur les examens des entreprises.
  • L’ombudsman elle-même, bien qu’elle n’ait pas mené d’entretiens ou déposé ces rapports, est payée entre $183 600 et $216 000 dollars par an.

Conséquences

Comme cité dans l’enquête initiale du Globe (traductions par le RCRCE) :

  • La promesse non tenue du gouvernement fédéral d’habiliter l’OCRE signifie que si les victimes d’abus présumés de la part d’entreprises s’adressent à l’OCRE, celui-ci « pourrait en fait aggraver le préjudice qu’elles ont déjà subi » parce qu’il « n’a pas le pouvoir d’égaliser les chances avec l’entreprise », a fait remarquer Catherine Coumans de MiningWatch Canada.
  • Selon Penelope Simons, de l’Université d’Ottawa, sans une surveillance plus stricte pour s’assurer que les entreprises respectent les droits humains, la réputation du Canada pourrait en souffrir et cela pourrait affecter la capacité du Canada à négocier des traités qui soutiennent les entreprises avec les États hôtes.

Renforcer l'OCRE : aider le Canada à combler son retard en matière de droits humains

Comme l’a déclaré l’ancien président du groupe de travail des Nations unies, le professeur Surya Deva, le Canada est « définitivement à la traîne par rapport à ses homologues occidentaux », « n’a pas adopté de plan d’action national sur les entreprises et les droits humains comme le Danemark ou les Pays-Bas », et n’a pas non plus promulgué de loi obligatoire sur la diligence raisonnable en matière de droits humains et d’environnement comme la France, l’Allemagne et bientôt l’UE, qui obligent les entreprises à prendre en compte les effets négatifs de leurs activités sur les peuples et la planète.

Donner à l’OCRE de véritables pouvoirs serait un excellent premier pas vers l’alignement du Canada sur les autres pays qui font des efforts appropriés pour lutter contre les violations des droits humains et de l’environnement commises par les entreprises multinationales basées dans le pays, les importateurs et leurs filiales.

En plus de donner à l’OCRE le pouvoir d’exiger la production de documents et de contraindre les témoins à déposer sous serment, le gouvernement fédéral devrait également exiger de l’OCRE qu’il :

  • soit plus transparent
  • agisse plus rapidement lorsqu’il reçoit des plaintes

Le RCRCE a élaboré un modèle de loi et un modèle de décret pour permettre au gouvernement de transformer l’OCRE en un organe de surveillance efficace. Un projet de loi d’initiative parlementaire inspiré de ce modèle est actuellement à l’étude à la Chambre des communes : Le projet de loi C-263, une Loi établissant le Bureau du commissaire à la conduite responsable des entreprises à l’étranger et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, contribuerait enfin à rendre le CORE efficace.

Les personnes lésées par des entreprises canadiennes opérant à l’étranger méritent que leurs droits soient respectés. Il est grand temps que le Canada donne à l’OCRE les pouvoirs minimums nécessaires à l’accomplissement de sa mission.

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